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Regarder et être regardé : une micro – politique de l’image

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CIMAM 2005 Annual Conference
“Museums: Intersections in a Global Scene”


Session 1

Regarder et être regardé : une micro – politique de l’image.

Maurizio Lazzarato


Pourquoi le projet de constitution européenne a échoué ? C’est la question que tout le monde se pose. Mais dans le paysage politique actuel, on ne trouve même pas un début de réponse.

Un projet artistique peut nous aider à poser autrement la question de l’Europe et interroger son devenir dans un espace qui dépasse le vieux rêve de l’Europe de Lumière. Le projet de constitution en effet a encore été pensé comme unité et identité des peuples européens, rêve qui a vécu jusqu’à la fin du XIX siècle (Nietzsche, par exemple) et qui a été encore au fondement de la politique européenne de l’après guerre.

Timescapes nous présente un paysage tout à fait différent. En interrogeant un projet européen qui, en passant par les Balkans, la Grèce, la Turquie se développe jusqu’au Tajikistan et d’autres pays de l’ancienne URSS, Timescapes nous montre une Europe qui n’est pas figée dans les Etats Nations, mais une Europe en train de se faire, en devenir, ouverte vers la Chine. Le projet en effet prévoie la construction d’infrastructures routières, ferroviaires, la construction des pipelines pour l’acheminement du pétrole et de infrastructures pour faire circuler informations, images et sons , qui, en suivant les traces de Marco Polo, se voudrait une nouvelle « route de la soie ». Sans le pouvoir d’évocation de cette dernière, il s’appelle plus prosaïquement « Trans Asian Higways ».

Transport des marchandises, de matières premières, de force de travail et d’information, de la Chine à l’Europe, voilà un projet néo-colonial et capitaliste ambitieux qui continue le projet de Bismarck de construire un corridor de chemin de fer entre l’Allemagne et l’Orient (Berlin – Bagdad), mais qui continue aussi le projet de l’ « Autoroute de la fraternité », construite par les jeunesses communistes de Tito, pour lier l’Europe au pays du Sud - Est européen.

La mise en place de ce projet se fait sur la base des politiques macropolitiques qui impliquent des rapports entre les institutions européennes et les gouvernements des pays traversés par ces infrastructures. Timescapes , au contraire, interroge le devenir de cet espace géo-politique et des populations qui y vivent, à partir des dynamiques micropolitiques de l’émigration, des déplacements forcés de populations, des « mouvements diasporique» que de millions de personnes sont obligé d’assumer à l’intérieur de différents pays (émigration interne) ou vers l’Europe (émigration externe).

Travailler sur ou travailler avec ?

Timescapes est un projet vidéo : voir et faire voir ce qui se passe dans cet espace aux portes de l’Europe. Voir et faire voir ce que les hommes politiques et les médias ne voient pas et nous ne font pas voir, en réactualisant une de potentialités que le cinéma n’a pas vraiment exploité : non pas seulement voir et faire voir des histoires, mais voir et faire voir l’Histoire (même si ici, à la différence de Godard, c’est plutôt le « devenir », ce qui est en train de se faire, que la caméra voudrait saisir et interroger).

Le point de départ du projet c’est la « répétition » du voyage que chaque été Angela Melitopulos, à l’initiative de Timescapes, faisait avec sa famille et avec des milliers d’autres émigrés (greques, turcs , yugoslaves, etc.), de l’Allemagne à la Grèce, pays de son père, en parcourant, les trajets qui sont maintenant l’objet du projet trans – asiatique.

Angela Melitopoulos, avait deux possibilités : ou travailler à la production des images « sur » cet espace géo-politique et « sur » ses populations, en réalisant un film selon les méthodes les plus classiques : se déplacer, avec son point de vue armé d’un œil-caméra en suivant les trajets des « mouvements diasporiques », interroger et filmer les choses et les gens qui sont impliqués ou exclus par les transformations qui bouleversent ces « paysages », etc. Ou bien ne pas travailler « sur », mais « avec », c’est-à-dire, confronter les choix des thématiques, la façon de filmer, les modalités d’enchaîner une image avec une autre image, avec d’autres vidéastes qui vivent et travaillent le long de ces « corridors ».

Voir le réel avec ses propres yeux-caméra et/ou le voir aussi avec les yeux-caméra des autres implique des dispositifs de production différente. Dans le premier cas, l’autre est un simple observé. On reproduit ici une posture connue et récurrente des cultures occidentales vers l’autre : l’observation, la description minutieuse qui catalogue, ordonne et hiérarchise. L’observation peut être à la fois complice ou méfiante, bénévole ou dominatrice, mais ce n’est pas ce qui importe. Que ce soit sous le regard de l’anthropologue, du réalisateur (même engagé), de la télévision ou du touriste, l’autre est toujours dans la même position : derrière la caméra, regardé , observé, catalogué.

La démarche de travailler « avec » implique que l’image soit « négociée », construite avec l’ « autre ». Elle devient l’objet d’une confrontation, d’un processus dissensuel,  ; elle constitue, justement, un des enjeux du projet.

En choisissant cette deuxième démarche, A. M. a décidé d’impliquer une artiste vidéo de Belgrade (qui travaille sur la situation d’après guerre en Serbie), un réalisateur d’Athènes (qui filme une place au pied de l’Acropole où se rencontrent les migrants qui arrivent de l’Iraq, Iran, etc ., en utilisant à la fois la fiction et le documentaire) et un groupe vidéo- activistes de Ankara (qui organisent des tournages sur les migrations internes forcées des Kurdes et des Turques).

Ce n’est pas que la première alternative ne soit pas légitime et praticable. Mais, la deuxième requiert une disponibilité à l’expérimentation politique et esthétique, à la mise à l’épreuve, à la confrontation avec les expériences perceptives, sensitives, politiques hétérogènes.

Le dispositif micro - médias.

Pour interroger et voir les dynamiques micro- politiques, il faut construire un dispositif micro - média, pour interroger et voir une multiplicité des forces, pour se confronter avec les regards – caméra des autres, il faut un dispositif de production et de montage pluraliste. Le mode de production d’une image n’est pas indifférent au résultat (Walter Benjamin).

Timescapes est une plateforme électronique, un micro network qui permet la fois la mise en commun des toutes les images tournées et la circulation des montages effectués par les participants au projet. Le net-work constitue une archive (une data base) électronique où tout le monde peut puiser pour à la fois voir et travailler avec les images des autres.

La construction du dispositif n’est pas une simple condition technologique du projet.

Des nouvelles méthodes de produire l’image nous obligent à voir des nouveaux aspects de la réalité visible et des nouveaux aspects du visible ne peuvent être perçus et rentrer dans notre horizons de sens, si il n’y a pas des nouveaux moyens pour les fixer. Les deux choses sont strictement liées l’une à l’autre.

Dans nos sociétés, les dispositifs techniques sont pensés et commercialisés comme des moyens de communication. La plateforme Timescape n’a pas été conçue et fabriquée comme un simple instrument de transmission d’informations, d’images, de sons, entre une situation A et une situation B. Les relations (sociales, esthétique, politiques) entre situations ou individus différents, ne sont pas déjà données, fixes et immuables, mais en formation, en devenir et en changement continu. Les relations ne se transmettent pas, mais se construisent et se créent dans à travers le dispositif technique.

L’agencement machinique doit, en un sens, être réinventé, pour pouvoir faire surgir les potentialités inexploitées des images et de leurs relations. La technologie et non seulement les images doivent rentrer dans un processus de singularisation pour échapper à leur « destinées » mass-médiatiques (communication standardisée) et s’ouvrir à la construction des processus de subjectivation.

Selon A.M., dans l’image il y a une multiplicité de matières expressives hétérogènes, une superposition des couches sémiotiques, une co-existence d’agencements discursifs et non discursifs. L’image contient une pluralité des strates d’affects, de sens, d’événements ; plusieurs niveaux de réalité et plusieurs « flux de conscience » se rencontrent. Ces différentes strates sémiotiques sont autant des composantes, autant d’énonciateurs partiels de la subjectivité.

Le dispositif permet de voir et de comprendre ce qu’il y a dans les images des autres, c’est-à-dire dans les éléments constitutifs de leur subjectivité. La lecture de ce que l’ « autre » a sélectionné et isolé du continuum visible, la confrontation avec sa manière d’agencer les images , ouvre des nouvelles potentialité, des nouvelles relations. « Je sens et je vois d’autres choses. Mais je sens et je vois aussi que je ne peux pas lire les images avec mes codes et mes grilles de représentation, puisque je ne connais pas leur espace /temps , leur hors cadre, ce qui vient avant et ce qui vient après, le moment et les raisons qui ont déclenché la caméra, etc . L’ autre peut refuser ma lecture, dire « non, ce n’est pas ça » et je suis alors obligé de me confronter avec d’autres manière de sentir et de voir. »

Il y a donc un travail préalable à faire sur la « représentation » et la subjectivité.

Les rencontres entre les auteurs sont une mise à l’épreuve de différentes modélisations de la subjectivité, puisque chacune est constituée par une cartographie faite de repères cognitifs, mais aussi mythiques, politiques, affectifs, hétérogènes. Produire une imagé « négociée », signifie produire une nouvelle subjectivité, signifie impliquer et mobiliser ces cartographies de la subjectivité, les risquer et les confronter au « regard » des autres.

Timescapes met en place des dispositifs incluant des méthodes de travail et des modes d’être, au lieu de se limiter à produire des « « œuvre » concrètes, en utilisant ainsi le temps de l’expérience comme un matériau. L’ « œuvre » se présente ainsi comme un univers et un vecteur de subjectivation « polyphonique ».

Société de l’image ou société des clichés ?

Nous vivons dans un monde où les images prolifèrent, mais dans lequel le mode de leur production n’est pas problématisé. Il est assumé comme une évidence, comme quelque chose qui va de soi. Le fait que il y ait quelque centaine de personnes qui produisent des images pour des millions de spectateurs (qu’il s’agisse d’un film ou d’un journal télévisé, peu importe), est quelque chose de pacifiquement accepté.

En réalité la presque totalité des habitants de l’Occident riche et développé se trouve dans la situation de l’ « autre » . Nous sommes tous regardés par des images, qui en réalité sont des « clichés », produit par des processus de tournage et de montage qui tendent vers l’automatisation et la standardisation. Nous subissons, sans nous en percevoir, une sorte de colonisation interne.

Il ne faut pas chercher Big Brother dans je ne sais pas quel système de surveillance ou de contrôle. Il faut le saisir dans la plus banale émission de télé et dans le plus normal produit cinématographique, dans la publicité la plus souriante.

Les clichés sont des images fermées, closes sur elles-mêmes, sans marges, sans virtualité, sans aspérités auxquelles on puisse s’accrocher . Il n’y a rien de vague, de problématique. Ce sont des images sans mouvement, bien qu’elle défilent. Ce sont des images violentes, bien qu’elles soient paisibles (quoi de plus « innocent » qu’ image publicitaire !) puisqu’elles sont à accepter ou à rejeter en bloc. Il n’y a rien qui déborde. Ce sont des images parfaites (techniquement), produites par des « professionnels de la profession ». Beaucoup de problèmes que la culture Occidentale rencontre avec les « autres » dérivent de cette violence de cet « aut - aut » que les images véhiculent : ou adhésion , ou refus, ou intégration ou exclusion.

Mais le pouvoir des clichés ne s’arrête pas aux limites d’un projet, fut-il, micro-politique. Dans la façon de voir et de représenter l’autre (que ce soit dans le regard de l’Occident ou dans celui de ceux qui n’en font pas partie), les clichés surgissent très vite et il faut faire un travail sur l’image pour neutraliser leur pouvoir de totalisation et de fermeture. Il y a là une question esthétique et politique dont Timescpas a mesuré toute l’urgence, confronté, à leur reproduction interne au projet.

Un dispositif événementiel

Les questions qui émergent du travail d’expérimentation de Timescapes sont nombreuses : comment faire de l’image un vecteur de subjectivation et non quelque chose de passivement représente ? Comment soustraire les composantes expressives verbales et préverbales de l’image et du son à la clôture totalisante et universalisante des clichés ? Comment faire surgir la relation, l’événement qui les constituent ? Relation avec les autres, relation avec le monde, la mémoire, le temps, c’est-à-dire comment interroger et faire voir le potentiel événementiel du monde, capter et rendre visible les possibilités qu’il recèle. La plateforme de Timescapes constitue un dispositif événementiel, pour découvrir et utiliser la puissance de création événementielle qu’il y a dans l’image et dans les relations entre images.

Angela Melitopulos, utilise ce que lui a suggéré un membre de l’équipe turque de Vidéa sur la façon orientale de raconter les histoires, pour rendre compte de la méthode de travail du projet. Dans la tradition orale orientale, le point de départ d’une histoire est donné par une suite d’image disjointes : un arbre, un puit, une fille, un homme à l’air méchant, un couteau. Cette suite indépendante d’image sollicite une histoire, une séquence qui est une rencontre (événementielle). Mais d’autres enchaînement, d’autre montage, d’autre « mondes » sont possibles. Nous avons ensuite une autre série d’images qui n’ont rien à voir avec la première : une ville, un marché, un pauvre paysan, un riche marchand, etc. Leur enchaînement constitue une autre série. Les deux séries sont indépendantes, mais leur rencontre fait progresser, bifurquer l’histoire. ( c’est exactement de cette façon que les philosophes moderne parlent de l’événement)

C’est la rencontre des images, leurs relations et les séries de leur enchaînement qui font advenir l’histoire. Elle n’existe pas avant, elle ne se développe pas selon un plan, un scénario. Raconter c’est suivre, être disponible et ouvert à la rencontre événementielle entre images et entre séries d’images indépendantes.

Selon A. M. c’est aussi la bonne façon de faire un documentaire et notamment un documentaire sur les minorités, puisque leur façon d’agir ne se déploie selon un plan établi à l ‘avance, mais selon une exploitation des possibilités, de rencontres, du potentiel événementiel du monde.

Le déplacement de migrants ne se fait pas de façon linaire, mais événementielle : on fait la connaissance de quelqu’un ou de quelque chose et ces rencontrent ouvrent des possibles ; on se met en voyage, on fait d’autres rencontres, les trajets bifurquent, etc. Ce n’est pas une manière d’agir linéaire, organisé préalablement.

Raconter une histoire signifie rester dans le flux du devenir où quelque chose se passe ; signifie agencer, connecter des images pour découvrir des relations imprévisibles, intempestives.

Nous pouvons tirer un autre enseignement de l’expérience de Timescapes : on peut comprendre des aspects déterminés de la réalité seulement en relation avec des méthodes déterminé qui servent à l’exprimer.

Tissage et nœuds

A. M. avait déjà démontré dans Passing Drame que l’image électronique de la vidéo, est très différente de l’image cinématographique, en utilisant, pour en parler, la belle image du tissage. L’image électronique n’est pas une impression de la lumière sur un support chimique (la pellicule), mais un tissage de fils (flux de lumière) dont l’Univers est fait. Les images sont le lieu où les différents fils (relations) s’enchevêtrent s’entremêlent, où ils dessinent une ritournelle, un enroulement sur soi. Elles constituent les nœuds du tissu. Le travail de l’artiste vidéo, comme celui du tisserand, est de tisser et retisser des flux de lumière avec un métier à tisser particulier (une caméra et une table de montage électronique).

Si Passing Drama était déjà un dispositif qui permettait de raconter une histoire de façon non linéaire à partir de l’archivage d’une multiplicité des composantes d’expression (flux d’images, de sons, des paroles, des temporalités, des vitesses), ici, dans le projet d’installation, elle fait encore plus confiance à la dynamiques événementielle des rencontrent des séries indépendantes. Les relations entre les différentes composantes d’expression ne sont pas fixées par le montage. A travers l’installation qui déploie les différentes composantes d’expression dans l’espace, elle laisse les flux d’image et de sons, les temporalités, les vitesse s’approcher et s’éloigner, apparaître et disparaître. Le tissage est plus vague, plus lâche. Il laisse plus d’espace à la co-création du spectateur, du « regardeur ».

La continuité et la discontinuité de l’Univers.

L’espace géopolitique du projet, se présente comme un univers discontinu. L’éclatement de la Yougoslavie et l’isolement de la Serbie, la nouvelle fonction de la Grèce dans l’Europe (son passage de pays d’émigration à destination des immigrés iraquiens, iraniens, etc.), l’enfermement de la Turquie avec une émigration interne qui s’amasse dans les quartier pauvre de Istanbul faute de trouver une débouchée européenne, la situation de la deuxième génération d’immigrés, déchirée entre deux cultures, etc.dessinent une cartographie d’un monde morcelé, fragmenté, discontinu.

Les différents participants au projet filment et font voir les choses et les relations entre les choses. Mais les point de vue, les choses et les relations ne participent pas à une même expérience, à un même univers (celui de l’Occident qui se croit universel).

Timescapes nous suggère qu’il y a deux manières de travailler à la composition, à l’être ensemble, à la combinaisons de ces discontinuités. Par totalisation et universalisation comme dans le grand projet européen et par des logiques qui tracent des lignes, de connexions, des continuités entre singularités sans les renfermer dans un tout.

L’univers des minorités, des mouvements diasporique n’est pas un « Univers - bloc », où les choses et les relations convergent vers une totalité, mais un « Univers - mosaïque », un Univers – archipel.

C’est un univers inachevé et incomplet dont la réalité et la connaissance se font de proche en proche, par addition, par collection des parties et des morceaux, par tissage des flux et des noeuds. Un univers où la composition doit suivre la cartographie des singularités, des petits mondes et des différents degrés d’unité qui l’animent.

Un monde additif ou le total n’est jamais fait et qui « croit ici et là », grâce, non pas à l’action du sujet universel, mais à la contribution parsemées de singularités hétérogènes. Dans ce monde de l’incomplet, du possible, où la nouveauté et la connaissance se produisent par taches, par places, par plaques, les individus et les singularités peuvent réellement agir (et pas seulement les sujets collectifs ou universels) et connaître.

Les modalités d’unification « absolues et complètes » et les modalités de composition pluraliste, renvoient aux logiques majoritaires et minoritaire, par lesquelles Deleuze et Guattari définissent la politique dans des sociétés modernes.

Le projet a révélé que la coopération (entre les auteurs) pour construire une image , n’est pas quelque chose de donnée préalablement mais quelque chose à construire. La multiplicité est à affirmer, à faire, mais en utilisant de savoirs et des techniques (mineurs), en inventant des jonctions (et de disjonctions) qui construisent des combinaisons chaque fois singulières, contingentes et non totalisantes.

L’Europe des minorités

Ce sont ces savoirs mineurs de composition et de rupture, d’invention et de répétition qui font défaut au projet européen, englué dans des conception totalisantes et universalistes de la politique (partagée aussi bien par les tenants du oui que du non à la constitution européenne).

Un territoire est une stratification et une sédimentation des mouvements, des flux, des sémiotiques. Il est fait des relations, des jonctions et des disjonctions, des arrivées et de départs, d’hybridation et de liaison. Le territoire est, pour continuer la métaphore textile de A. M., un patchwork. L’espace européen n’échappe pas à cette règle. Les mouvements migratoires, diasporiques sont constitutifs de cet espace et cela depuis longtemps. La dynamique constitutionnelle de l’Europe les ignore, les méprise, ne les prends pas en compte. Seulement les minorités travaillent ces connexions, enrichissent ces hybridations, tissent des relations entre singularités. Sous la représentation linaire de l’histoire, il faut reconnaître la dynamique événementielle et constitutive des minorités. C’est cette réalité que Timescapes nous donne à voir au croisement de l’esthétique et de la politique.